Monte, petit lotus, monte. Grandis, transperce le ciel, libère-toi de ton bourbier. Montre au monde à quel point tu es beau..


Pour Rufus, la fin a toujours justifié les moyens.

Né dans la merde, le voisin d'à côté était un chien errant. Celui d'au-dessus, un tueur en série. Papa violent, papa abusif. Papa ? Mort. Maman inconnue, parce que là-bas, les femmes ne faisaient pas long feu. Pour vivre, il fallait survivre, et pour survivre..

Voler. Faire du mal. Le mal est subjectif, pourtant : il n'a pas de début, pas de fin. Pas de forme tangible à laquelle s'accrocher. Difficile de distinguer la bienséance quand les codes n'ont toujours été qu'un mythe. A la place, on se retrouve avec une sensation aigre-douce de domination, d'être au-dessus.

D'avoir l'avantage.

C'est bien, d'avoir l'avantage. Surtout quand on commence tout en bas. Dans le marais. Le sentiment est d'autant plus euphorique, et on s'y raccroche. «Et si je pouvais vivre comme ça ? Sans réfléchir, sans avoir peur. Juste en ayant le dessus.» Belle aspiration, il s'y est attaché sans même s'en rendre compte.

Parce que c'était plus facile comme ça.

Le mal, il l'a toujours fait avec le sourire. Ô pauvre enfant, il ne savait pas ce qu'il faisait.. ! Lui, il voulait juste être comme ces alchimistes, ces magiciens de rue qui plient soi-disant les règles du monde à leur volonté. C'était beau, remarquable.

Tout comme on ne peut imaginer une couleur, on ne peut pas non plus imaginer le futur sans l'avoir sous les yeux. Pour ça, il faut une icône, un symbole sur quoi se fixer. L'alchimie, c'était un bel art, une solution. Il a cultivé cet atout. A quoi bon être doté d'un cerveau si ce n'est pour pas l'utiliser ? Oh, il a cogité. La science, la vérité. Connaître le monde pour mieux le plier à sa volonté.

Plus tard, la guerre a été sa délivrance. Pour faire la guerre, il fallait des armes : les alchimistes étaient des armes. Dans la guerre, il a trouvé son salut, la destruction pour une cause noble et pardonnée. Dans la guerre, il a à nouveau ressenti ce sentiment, l'exaltation de la domination, d'avoir le dessus sur le reste.


.. et brille, brille toujours, hors du bourbier, là où le vrai monde se trouve. Là où est ta place. Vis dans un monde où tu peux être heureux, où chaque chose est ton jouet, où rien n'est plus douloureux. Belle utopie, que tu diriges d'une main de fer.